Injustice, colère, blessures, disputes, pleurs : des mots que nous prononçons tous un jour ou l’autre. Les conflits surviennent au sein des couples, des familles, entre amis ou encore au travail. Leur gestion ne va pas de soi. Heureusement, il existe des pistes à explorer pour décoder nos mécanismes de fonctionnement et éviter l’escalade, comme les ateliers proposés par Diana Gossett, Bellerine depuis 2007 ; prochaine session dès le 4 septembre. Rencontre.
Parlez-nous de votre enfance atypique
« Je suis née en Allemagne. Mon père enseignait et souhaitait travailler pour l’école allemande à l’étranger. Après le divorce de mes parents, ma sœur et moi l’avons suivi au Salvador. Nous avions alors 3 et 5 ans. De cette expérience, je conserve beaucoup de souvenirs incroyables. Certains très beaux : nos voyages, la mer, les animaux, d’autres plus difficiles, tels que les tremblements de terre, le couvre-feu, les exercices de sécurité. Le précieux cadeau emporté dans ma valise, sans doute l’ouverture de mes horizons, notamment grâce à la langue espagnole et la musique. Aujourd’hui encore, je reste profondément attachée à l’Amérique latine. »
Vous êtes rentrée en Allemagne à l’âge de 10 ans. Comment avez-vous poursuivi votre cursus ?
« Après mon diplôme de fin d’études, j’ai suivi un apprentissage en hôtellerie à Cologne dans un hôtel cinq étoiles. J’aimais le contact client et la pratique des langues. Une amie rêvait de travailler en Suisse, et j’ai accepté de l’accompagner pour une saison à Brienz. Le cadre magnifique m’a subjuguée et j’ai tissé des liens profonds avec mes collègues. Résultat : j’y suis restée six ans. D’abord en tant que saisonnière, ce qui m’a permis de beaucoup voyager, et de retourner en Amérique latine, puis en tant que cheffe de réception à l’année. C’est un travail très dur, très prenant que j’ai consciemment décidé de quitter en devenant assistante-cheffe réceptionniste à Montreux. Une occasion en or pour pratiquer le français et découvrir une nouvelle région. J’y ai aussi rencontré mon futur mari. Nous nous sommes installés à Bex. »
Votre mari avait divorcé et était père. Sa situation vous a-t-elle incitée à vous former à la « communication non violente » et à la « médiation de conflits » ?
« Il est vrai que j’avais très mal vécu le divorce de mes parents. D’une part parce que je ne parvenais pas à exprimer mes propres émotions, d’autre part parce que leur position respective avait engendré la rupture du dialogue. En grandissant, j’ai vu nombre de familles se briser dans la souffrance de façon irréversible, et j’ai veillé à ce que les enfants de mon mari ne traversent pas un scénario similaire. Une communication fluide représente un élément clé. Pour gérer notre situation personnelle, en couple, nous avons participé à des ateliers de Communication Non Violente. Naturellement, je n’ai pris conscience que bien plus tard, que l’origine du chemin était bien antérieure à ma remise en question de la quarantaine. Les premières années de ma vie ont façonné le futur de mon parcours professionnel. »
Vous vous êtes donc formée spécifiquement.
« À partir de 2020, j’ai commencé à suivre des cours. D’abord en Communication Non Violente, puis en médiation de conflits. Mon travail de mémoire, en 2024, portait sur « La séparation parentale — Le vécu des parents face à celui de l’enfant lors d’une séparation parentale ». En choisissant ce sujet, j’ai compris les liens entre tous les moments importants de ma vie, et la transmission de mes acquis m’est apparue comme une évidence. »
Aujourd’hui, vous proposez des ateliers « Communication et gestion de conflit ». En quoi consistent-ils ?
« De mon cursus, j’ai tiré des enseignements très divers. Je les ai compilés afin de créer ma propre méthode pour des groupes de 4 à 8 personnes. Les ateliers permettent d’entrevoir ou d’approfondir les mécanismes personnels au moyen d’exercices en groupe et en binôme. Dans leur cadre, en s’exprimant, il est possible d’explorer des postures réactives différentes de celles du quotidien, de travailler l’écoute active, d’apprendre à contrer des critiques négatives. Le but : que les participants s’approprient leur authenticité. Je leur donne un support de cours, et ils peuvent ainsi s’y référer en répétant certains scénarios avec des proches, par exemple. J’utilise des situations réelles ou fictives. Ensemble, nous les décortiquons, nous cherchons le point de bascule et réfléchissons à des alternatives viables. Mis en position d’observateurs, les membres du groupe prennent du recul, en contenant les émotions. »
Vous proposez donc des outils pour que l’expression des frustrations ou des colères puisse être entendue sans drame, et que le dialogue continue ?
« Oui. Souvent, lors d’un conflit, nous campons sur « J’ai raison » et l’autre aussi. Les deux parties sont sincères, mais elles oublient la complexité de leur nature, et si cela va trop loin, il est difficile de se rejoindre. Je pense ici à des situations de couple ou au binôme enfant-parent. La boîte à outils existe. Je la présente pendant les ateliers et nous l’explorons ensemble. Chacun utilise ensuite ceux qu’il souhaite. »
Diana Gossett œuvre à rapprocher les êtres humains. Certes nous sommes tous différents, mais nos besoins fondamentaux, théorisés par Marshall Rosenberg, restent les mêmes : subsistance, protection, affection, compréhension, participation, oisiveté, création, identité et liberté. Ils sont intrinsèques à notre essence, mais ils le sont aussi à celle de notre interlocuteur, celui avec qui nous risquons d’entrer en conflit. La paix se construit au quotidien avec notre entourage. Le contexte actuel nous démontre encore que nous sommes prêts à investir énormément d’énergie, de temps et de ressources dans les disputes, les conflits et même la guerre. Pourtant, si nous utilisions un peu de cette énergie, de ce temps et de ces ressources dans l’empathie, l’écoute et la recherche de solutions à l’amiable, la paix aurait plus de chance. Chaque pincée de paix apporte du bonheur et de la joie. Si une boîte à outils accessible y contribue, pourquoi pas ! Le prochain atelier s’articulera autour de trois rencontres qui se dérouleront à la Maison Blanche à Monthey de 19h30 à 22h dès le 4 septembre.
Informations
- Photos : N. de Santignac