La photo dans la peau

Né en 2001 à Aigle, Gabriel Monnet a grandi à Bex. Photographe de presse, spécialisé dans les images sportives, il reçoit le premier prix du Swiss Press Photo 2022, dans la catégorie « sports », pour son cliché de l’athlète paralympique suisse Marcel Hug. Cette consécration inattendue l’a conforté dans une voie tracée depuis longtemps.

 

Gabriel Monnet
Gabriel Monnet

 

Le cliché victorieux, capturé en fin de course, alors que Marcel Hug regarde son résultat sur l’écran géant, nous saisit à plus d’un titre. D’abord, nous percevons l’effort venant d’être consenti, en raison de la bouche entrouverte reprenant son souffle, ensuite, les perles de pluie ruisselante sur le casque du sportif témoignent de conditions climatiques difficiles, enfin le reflet de la piste dans celui-ci, masquant les yeux de l’athlète, propose une plongée dans ses pensées.

 

Un apprentissage adapté

A seize ans, Gabriel Monnet entre au Centre d’enseignement professionnel de Vevey (CEPV) et commence son apprentissage en tant que photographe. Il suit les mêmes cours thématiques que les étudiants, mais passe la plupart de son temps dans le laboratoire à développer des photos ou dans le studio à tourner autour d’objets pour l’archivage des travaux d’élèves, ce qui ne le ravit pas entièrement. « Dès le début, j’ai aimé me positionner sur le terrain et partir en reportage. Pendant mes stages, au Nouvelliste, L’illustré ou chez Keystone-ATS, mes responsables ont tout de suite compris que mon point fort n’était pas de rester enfermé dans un bureau », dit-il radieux. En tant que stagiaire, il explore des sujets très variés, tire le portrait de personnalités plus ou moins célèbres, et se tisse un solide réseau tout en étoffant son book. En 2020, il couvre les Jeux olympiques de la Jeunesse à Lausanne. Satisfaite de son travail, l’agence Keystone-ATS le recommande à Swiss Paralympic, en quête d’un professionnel prêt à s’envoler vers Tokyo, afin d’immortaliser les exploits des athlètes suisses aux Jeux paralympiques de 2021.

 

L'athlète suisse, Marcel Hug, réagit après sa victoire dans la finale du 800m d'athlétisme en fau-teuil roulant lors des Jeux paralympiques d'été à Tokyo, Japon, le jeudi 2 septembre 2021. (© Swissparalympic/ Gabriel Monnet)
L’athlète suisse, Marcel Hug, réagit après sa victoire dans la finale du 800m d’athlétisme en fau-teuil roulant lors des Jeux paralympiques d’été à Tokyo, Japon, le jeudi 2 septembre 2021. (© Swissparalympic/ Gabriel Monnet)

 

La professionnalisation

Gabriel Monnet apprécie le rythme soutenu du métier, le plaisir de découvrir ses images dans les publications, mais reconnaît qu’il n’est pas toujours facile de prendre la bonne photo au bon moment. Il prend grand soin de se préparer lors de ses reportages, notamment directement sur les lieux : « Je me rends sur place, j’étudie le terrain, je m’informe sur les personnes que je vais devoir photographier ou des accréditations nécessaires ». Le jour J, l’œil de Gabriel Monnet reste irrésistiblement attiré par les jeux de lumière, les nuances d’ombres et les contrastes : « La noirceur ajoute de l’intensité, de la force aux sujets », précise-t-il. L’entrée dans la vie professionnelle s’accompagne aussi de la prise de conscience de tout le pan administratif qu’il faut gérer en tant qu’indépendant. Heureusement, Gabriel Monnet connaît nombre de photographes qui l’aiguillent sur ces questions. Il apprend à anticiper les incertitudes de son nouveau statut, et économise sur ses revenus, car « je ne sais jamais trop, ce que je vais gagner chaque mois ». Actuellement, le jeune homme travaille plus pour des commanditaires basés à Lausanne ou Genève. Il se réjouit de poursuivre sa collaboration avec Swiss Paralympic, notamment lors des prochains championnats du monde de para-athlétisme à Paris et de paracyclisme à Glasgow cet été : « Je suis content de retrouver les athlètes que j’ai déjà croisés. Nous avons de bons souvenirs en commun. L’ambiance en dehors des épreuves reste cordiale. On échange beaucoup avec d’autres équipes. Je veux d’ailleurs me mettre sérieusement à l’allemand. C’est très frustrant de devoir utiliser l’anglais avec mes compatriotes germanophones. J’aime rencontrer des gens et construire des relations durables. »

 

Le Français Hyacinthe Deleplace et son guide Roy Piccard participent à la première manche du slalom hommes déficients visuels des championnats du monde FIS para, le 29 janvier 2023 à Espot, en Espagne (© Gabriel Monnet
Le Français Hyacinthe Deleplace et son guide Roy Piccard participent à la première manche du slalom hommes déficients visuels des championnats du monde FIS para, le 29 janvier 2023 à Espot, en Espagne (© Gabriel Monnet

 

Gabriel Monnet a connu le monde du sport, bien avant de sortir son appareil sur les terrains, lors de compétitions auxquelles il participait – football et ski. Il reste membre du ski-club de Bex, et bien qu’il ne concoure plus, il pratique avec plaisir le ski de fond « pour l’ambiance et les copains ». Il se ressource dans la nature avec bonheur. Elle lui permet de se vider l’esprit. La reconnaissance liée au Swiss Press Photo n’est pas montée à la tête du jeune bellerin, au contraire. Il se sent très humble de l’avoir reçu, surtout en raison de son âge. Il pense également à tous ses amis photographes talentueux qui ne l’ont pas encore obtenu, et qui le méritent.

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Natacha de Santignac

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Journaliste

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