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Médecines complémentaires : quelques garde-fous pour choisir le meilleur thérapeute

Les médecines complémentaires attirent beaucoup de monde, particulièrement des personnes en traitement pour le cancer, des personnes en détresse, d’autres qui ont perdu confiance dans la médecine traditionnelle ou qui recherchent des traitements différents et qui prennent plus en compte la totalité de la personne. Plusieurs thérapies complémentaires sont reconnues comme efficaces mais certaines ne sont pas exemptes de danger et peuvent être pratiquées par des thérapeutes sans scrupules. La recherche du bon thérapeute n’est pas simple, malgré la pléthore actuelle. Et gare aux mauvais choix !

 

Patrick Graff, entouré de (g. à d. - en haut - Natalia Herren, Karine Jacquier, Adrienne Chollet et g. à d. - en bas - Doris Strano et Irène Wyss
Patrick Graff, entouré de (g. à d. – en haut – Natalia Herren, Karine Jacquier, Adrienne Chollet et g. à d. – en bas – Doris Strano et Irène Wyss

 

Succès des médecines complémentaires en Suisse

Le recours aux médecines complémentaires en Suisse n’est pas un phénomène anecdotique puisque, selon l’Enquête suisse sur la santé réalisée en 2017, 28% de la population suisse y fait recours chaque année. Dans le canton de Vaud, le pourcentage s’établit à 38%, en augmentation depuis 2007 (31%). Les femmes manifestent un plus grand intérêt (46%) que les hommes (30%), de même que les personnes ayant une formation tertiaire (48%). Pour comparaison, 68% de la population vaudoise a été consulter un médecin au courant de l’année.

 

Quelques définitions

Nous nous référons au document « Médecines complémentaires dans le canton de Vaud : Recours et offres actuelles, principaux enjeux sanitaires et possibilités de réglementation » de 2016. Définissons déjà ce qu’on entend par traitements conventionnels. Il s’agit de traitements basés sur des études scientifiques qui répondent à des critères stricts reconnus sur le plan international. Les auteurs ont adopté la définition suivante de la médecine complémentaire : « ce sont un large ensemble de pratiques de soins qui ne sont pas intégrées dans la tradition académique ou le système dominant du pays. Le terme « médecines complémentaires » est utilisé parce qu’il est le plus communément admis en Suisse. Il recouvre diverses appellations telles que médecine « parallèle », « douce », « naturelle » ou « alternative ». À noter que dans cette étude, l’activité des « guérisseurs » (« rebouteux », « magnétiseurs », « faiseurs de secret ») n’était pas prise en compte car leur pratique repose en général sur la revendication d’un don inné ou d’une transmission secrète. Il n’y a donc pas de formation ni de diplôme.

 

l'Espace Santé Rennaz (ESR)

 

Foisonnement de méthodes

Les pratiques des médecines complémentaires sont extrêmement variées (250 en Suisse). Elles vont des thérapies d’inspiration biologique (phytothérapie, aromathérapie…) aux thérapies qui présentent un système à visée holistique comme la médecine anthroposophique ou la médecine chinoise. Il y a aussi les interventions psycho-corporelles (hypnose, sophrologie, méditation…) et les manipulations thérapeutiques corporelles (ostéopathie, drainage lymphatique, shiatsu…). Pour des pratiques telles que le reiki, la kinésiologie, le qi gong, on pensera plutôt à des thérapies énergétiques.

 

Efficacité des médecines complémentaires

Les auteurs, reprenant les résultats de plusieurs études, mettent en évidence que l’efficacité de plusieurs traitements a été démontrée scientifiquement. Par exemple, l’acupuncture dans le traitement de l’arthrose, des cervicalgies, des lombalgies chroniques, dans le traitement des vomissements après une chimiothérapie ou encore le millepertuis dans le traitement de la dépression moyenne à modérée. Quant aux effets indésirables des médecines complémentaires, ils seraient rares (intoxications, lésions traumatiques, infections, interactions avec d’autres traitements) mais peu documentés.

 

Lois au niveau suisse

Suite à l’adoption en votation populaire le 17 mai 2009 de l’article constitutionnel pour une meilleure prise en compte des médecines complémentaires, le Département fédéral de l’intérieur a décidé à partir du 1er janvier 2012 et jusqu’à fin 2017, d’inscrire provisoirement la médecine anthroposophique, l’homéopathie, la thérapie neurale, la phytothérapie et la médecine traditionnelle chinoise dans le catalogue des prestations de l’assurance-maladie obligatoire. En 2017, il a été décidé de garder ces prestations à condition qu’elles soient administrées par des médecins agréés.

 

Mais qu’en est-il en Suisse des autres thérapeutes non médecins voulant proposer des thérapies complémentaires ? La reconnaissance des formations dispensées en Suisse dans le domaine des médecines complémentaires repose sur l’appréciation d’organismes privés tels que la Fondation ASCA, fondation suisse pour les médecines complémentaires et le RME Registre des médecines empiriques ainsi que par des associations professionnelles. Les critères de reconnaissance sont extrêmement variés. C’est sur cette base que les assurances complémentaires choisissent les thérapeutes qu’ils rembourseront. Sans assurance complémentaire, vous devez y aller de votre poche.

 

Situation dans le canton de Vaud

L’autorisation d’exercice est une compétence cantonale et il n’y a pas de réglementation particulière dans le canton de Vaud. Ainsi, 2’500 personnes sont au bénéfice d’une accréditation de l’ASCA et/ou du RME pour l’une des 140 thérapies recensées par ces deux organismes privés. Moins de 1% d’entre eux sont des médecins diplômés. On n’a aucune idée du nombre d’autres thérapeutes non accrédités qui travaillent dans le canton de Vaud car il n’existe aucune obligation d’enregistrement auprès des autorités sanitaires.

 

Les praticiens

Voici quelques exemples de praticiens dans le domaine des médecines complémentaires. Patrick Graff était médecin-chef en gynécologie à l’hôpital d’Aigle où il y pratiquait l’acupuncture depuis 2004. Il fut ensuite responsable de la médecine intégrative en gynécologie et obstétrique de 2009 jusqu’à sa retraite en 2019. Il a participé à la mise en place de ce service à l’hôpital de Rennaz. À sa retraite en 2019, il a ouvert le centre de médecine intégrative (CMI) à l’Espace Santé Rennaz (ESR). Il a commencé une formation en acupuncture en 1996 en suivant plusieurs formations en France parachevée par un séjour de six semaines en Chine. Il a obtenu le DIU universitaire d’acupuncture ainsi que le FMH en acupuncture.

 

  1. Graff nous signale qu’en 2015, le parlement suisse a voté une révision de la loi sur les professions médicales (LPme, entrée en vigueur en 2020) qui a introduit des cours obligatoires dans le domaine de la médecine complémentaire dans le cursus de base des médecins, dentistes et vétérinaires. « C’est une preuve que la médecine accepte l’importance de la médecine complémentaire dans les soins médicaux. Cela n’existe qu’en Suisse ! » s’enthousiasme M. Graff. Pour lui, il était impératif d’engager des thérapeutes ayant une formation reconnue, certifiés ASCA et/ou RME. De plus, ces personnes devaient adhérer au principe de la collaboration avec la médecine conventionnelle.

 

  1. Graff nous a présenté une des membres du Centre, Mme Irène Wyss, diplômée en aromathérapie médicale. Cette thérapeute est aussi diplômée en réflexologie plantaire et palmaire appliquée à la méthode chinoise. Elle a plus de 15 ans d’expérience dans ces domaines et elle est certifiée ASCA/RME. Elle est aussi formatrice en aromathérapie. Le centre comprend également une ostéopathe Mme Natalia Herren, une praticienne en hypnose et art-thérapie Mme Adrienne Chollet, une pratiquante du drainage lymphatique Mme Karyn Jacquier et une pratiquante du drainage lymphatique et de la réflexologie plantaire Mme Doris Strano.

 

Nous avons aussi interviewé une thérapeute indépendante, Mme Julie Marcombes, installée à Préverenges. Pour elle, un cursus en anatomie, physiologie et pathologie est très important pour sa pratique, raison pour laquelle elle a suivi cette formation à L’Institut holistique de la santé à Chavannes-près-Renens. Elle s’est formée pendant 10 ans en suivant de nombreuses formations dont elle en fait la synthèse telles que la kinésiologie, l’hypnose, l’aromathérapie, la santé par le toucher et la réflexologie plantaire. Elle est agréée ASCA pour ces deux dernières formations. Mme Marcombes traite une large palette de troubles tant dans le domaine physique (problèmes de peau, douleurs, maux de dos…) que dans le domaine psychique (angoisse, confiance en soi, stress, burn-out…). Selon elle, « il est important de travailler sur ses émotions qui, mal gérées, peuvent être la cause d’un déséquilibre dans le corps ».

 

Exemple de dérive

À côté du sérieux de nombreux thérapeutes, il y a aussi des charlatans qui peuvent profiter d’une situation présentant un certain flou pour gagner facilement de l’argent. À l’époque, Jonas Graf, un jeune habitant du Chablais, vivait une situation difficile : il conjuguait des études exigeantes avec un job dans la restauration dans lequel il rencontrait des problèmes relationnels.

 

En cherchant sur Internet, une femme qui se présentait sur YouTube comme spécialiste en hypnose a attiré son attention. Entré en contact avec elle par mail, toutes leurs interactions se sont déroulées ensuite par vidéo conférence. Il lui a raconté son parcours. « Ce qui m’a frappé, c’est qu’elle m’a tout de suite dit que j’étais destiné à de grandes choses, que j’avais un potentiel énergétique très fort et que dans un futur proche, j’allais aider les gens au niveau énergétique », confie-t-il. Elle lui a conseillé de ne pas mettre toute son énergie dans ses études. Il a accepté de commencer une série d’entretiens et a signé un contrat. Ce qui l’a rassuré, c’est que la thérapeute proposait plusieurs méthodes différentes, reiki, chamanisme, hypnose, méditation, etc.

 

La thérapie choisie était l’hypnose avec régression dans les vies antérieures qu’elle lui demandait d’incarner. C’est lors de séances de méditation en groupe où elle a commencé à raconter qu’ils étaient observés par des extraterrestres qu’il s’est dit que ce n’était pas normal. Il a alors décidé d’arrêter la thérapie car il ne voyait aucune amélioration dans son état. Il a d’abord tenté de porter plainte à la gendarmerie. Sans succès : selon le droit suisse, il existe la responsabilité individuelle : il est difficile de se plaindre pour un service qui a été reçu et payé.

 

Après en avoir discuté avec son entourage, il a décidé de demander à la thérapeute de le rembourser, ce qu’il a obtenu suite à de nombreux messages la menaçant d’aller plus loin.  Jonas, pris de remords face au danger que d’autres personnes puissent tomber dans ce piège, a contacté des associations suisses (sans succès) puis il a cherché des associations en France. Il a finalement pu entrer en contact avec Didier Pachoud, président du Groupe d’étude des mouvements de pensée en vue de la protection de l’Individu (Gemppi), une association spécialisée dans le domaine des croyances religieuses et thérapeutiques holistiques pour réaliser une interview sur YouTube. De plus, il a lancé une procédure pénale.

 

Deux ans ont passé et Jonas va beaucoup mieux, il a terminé ses études et travaille dans son domaine. Suite à cette expérience, il conseille de faire très attention quand on s’oriente vers des thérapies non-conventionnelles. Pour sa part, il se renseignerait sur les méthodes utilisées, si la personne dispose d’une véritable formation certifiée par un diplôme reconnu. Il se détournerait totalement des personnes qui se disent chamane ou qui utilisent des objets magiques comme des grigris.

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Article écrit par

Florence Moreau

Florence Moreau

Journaliste

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