Un nouvel ouvrage publié par l’Académie du Chablais vaudois fait le bonheur des amateurs d’histoire et des Aiglons en offrant une vue approfondie sur 1000 ans de leur passé. Il lève le voile sur quelques inconnues et corrige quelques imprécisions.

Le syndic d’Aigle Frédéric Borloz avait le sourire lors de la conférence de presse tenue début juin au château, un cadre de circonstance pour cet événement qui lui a permis de présenter avec fierté un ouvrage de quelque 400 pages illustrées de nombreux graphiques et reproductions. Il a également confié que le temps du confinement lui avait permis de le dévorer entièrement et avoir appris une foule de choses passionnantes sur la commune dont il est à la tête depuis plusieurs années. « J’aurais aimé pouvoir le lire avant le début de ma carrière politique tant qu’il m’a apporté d’éléments pour mieux comprendre ma région, ses mentalités et la terre. »

L’architecte en chef de cet ouvrage est Henri-Louis Guignard, ancien secrétaire municipal de la commune d’Aigle et président de l’Académie du Chablais vaudois, une association qui réunit par cooptation des professionnels et des passionnés d’histoire de la région. À relever que c’est lui qui a fait la mise en page manuellement. Un vrai travail de bénédictin en ces temps d’informatisation aiguë.

Comme tous les ouvrages de l’Académie du Chablais qui ont déjà été consacrés à d’autres communes, notamment celles des Ormonts et d’Ollon, l’élaboration de ce « grand » dernier a demandé un certain temps. Mais il n’a fallu finalement que neuf années de gestation aux auteurs, professeurs d’université, historiens, historiens de l’art, spécialistes du rail et autres architectes pour mener à bien des recherches dans les archives municipales, cantonales – vaudoises et bernoises. Elles ont été réunies dans ce gros pavé qui met en lumière une histoire qui commence avec le temps des glaciations et se termine vers les années 60. Riche de ses vignes, de son agriculture et d’une activité industrielle d’importance, Aigle a toujours su se réinventer au cours des siècles, grâce à la ténacité de ses habitants.

Les illustrations apportent à l’ouvrage des respirations bienvenues et permettent par leur visualisation de mieux entrer dans les siècles passés et de se rendre compte de l’évolution du bâti et de l’environnement au cours des siècles. Elles sont des témoins extraordinaires d’un passé parfois pas si lointain et pourtant déjà oublié.

Le livre a aussi le mérite de mettre en lumière l’histoire du Chablais vaudois. Il est plutôt rare en effet que cette partie du canton fasse l’objet de tant d’attention. Le Chablais n’est en effet devenu vaudois qu’à la révolution de 1798. Soumis au bailli de Chillon du temps des Savoie, les trois mandements d’Aigle, Ollon, Bex ont ensuite été occupés par Berne dès la deuxième partie du XVe siècle. Ils ont ainsi bénéficié d’un statut spécial et ont passé à la réforme protestante dès 1528, tandis que le Pays de Vaud n’est finalement conquis par l’Ours qu’en 1536. Aujourd’hui, le Chablais fait bien entièrement partie du canton, notamment depuis fin 2016, lorsqu’il a été intégré dans Mobilis, le concept de transports régional vaudois.

Le livre pèse 2,4 kilos, ce qui en fait difficilement une lecture avant endormissement. En revanche, son intérêt tiendra à coup sûr le lecteur éveillé, qu’il soit un Aiglon de souche ou d’adoption. Pour la petite histoire, relevons que le lancement initial était prévu pour le 16 mars et qu’il a dû être remis, pour cause de pandémie, à début juin. Mais nul besoin d’un autre confinement pour se plonger avec délices dans les pages d’histoire d’une région essentielle parce que située sur la fameuse voie nord-sud du Grand-Saint Bernard qui a vu défiler pendant des siècles l’essentiel du trafic européen.